mardi, 14 octobre 2014 09:57
(Agence
Ecofin) - Une étude commandée par la coalition camerounaise Publiez Ce
Que Vous Payez et soutenue par le Natural Resources Governance
Institute, a mis en évidence le fait que si, effectivement, l'engagement
de la junior minière australienne Sundance Resources à procéder à des
compensations environnementales dans le cadre de son projet
d'exploitation de minerai de fer dans la zone camerounaise de Mbalam est
à encourager, il reste cependant insuffisant au regard des standards
africains et résiste difficilement à une analyse profonde.
Dans son étude d'impact environnemental publié en 2010, Camiron, la filiale au Cameroun de l'opérateur australien indiquait: « Le projet de Mbalam produira environ 17 millions de tonnes de CO2
sur la durée du projet. Le projet ne sera pas neutre en carbone, mais
la proposition de protéger l’UFA 10034 avec 164 000 ha de forêt intacte
protège un puits de carbone de plus de 200 millions de tonnes de CO2 »
Seulement, James Atworth, l'expert indépendant ayant réalisé l'analyse de la compensation, met en évidence deux faits.
Déjà
il estime que l'empreinte environnementale a été minimisée car l'étude
n'a pas pris en compte le besoin qu'il y aura de construire un nouveau
barrage hydroélectrique, dans la deuxième phase du projet. M. Atworth
fait aussi remarquer que l'obtention du droit de protéger une unité
forestière évaluée à 200 millions de tonnes de CO2, n'est pas forcément une panacée de compensation. « L’idée
que l'exploitation de l'UFA 10-034 mettrait en danger tout sauf une
très petite proportion du stock de 200 millions de tonnes de CO2 estimées dans la zone de concession est erronée, puisque l’exploitation de l’UFA est faite de manière sélective.» a expliqué James Atworth.
La
deuxième réserve apportée à la proposition de compensation
environnementale de Sundance Resources au Cameroun porte sur le volume
de ressources financières affecté à cet effet. Sur les 25 ans de durée
du projet, en vertu de la convention minière avec le gouvernement du
Cameroun, l'opérateur australien devra payer une redevance annuelle qui
s'élèvera à environ 4,00 dollars par hectare et par an au cours de la
phase de construction et à 6,00 dollars par hectare et par an au cours
de la phase de production, pour 164 000 ha, soit l'équivalent de 23,26
millions $ pour les 25 ans.
M.
Atworth fait oberver que cela reste très inférieur aux 93 millions $ de
recettes qui auraient été perçus si les unités forestières protégées
avaient été exploitées. Mais surtout, il fait remarquer, que la
négociation n'a pas été faite au mieux des intérêts du pays, car le prix
moyen de la compensation carbone est de 8,3 $ par tonne de CO2.
Or, en Australie, il est de 23, $ et les grands groupes, aujourd'hui,
ont fixé un prix virtuel de 40 dollars. Sur la base de ces valeurs, les
pertes en compensation environnementale sont de l'ordre de 75% de ce
qu'elle devrait être réellement, soit un manque à gagner dans
l'hypothèse maximale, de 471,6 millions $. Une autre étude parallèle
mené par la Columbia Center for Sustainable Investment (CCSI) s'est
étonné de cet engagement minimal.
« Selon
notre analyse du model fiscal de la convention de projet d'exploitation
de fer à Mbalam, si on prenait en compte le prix maximal de
compensation environnementale tel que présenté par James Atoworth,
l'impact sur la rentabilité du projet serait de seulement 2 points de
pourcentage. Le projet continuerait de présenter un taux de rendement de
24%, conformément à ses propres prévisions, et la part de recettes
perçues par l'Etat se situerait autour des 40%, un chiffre dans la
moyenne de plusieurs pays en Afrique », a commenté pour sa part Nicolas Meannling, l'expert de CCSI.
Rappelons
que cette étude intervient alors même que le Cameroun est dans un
processus de révision de son code minier. Une révision qui est fortement
influencée par le besoin d'attirer les investisseurs et qui, de l'avis
de la société civile, et même de certains parlementaires qui étaient
présents à la présentation de l'étude, risque de ne pas trairer de
manière efficace cette question des compensations environnementales.
Idriss Linge
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